Les humains savent contrôler leurs pulsions ? Mais les rats aussi…

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Le 3 décembre 2010 par Jean-François Dortier

Que faire quand on a faim mais qu’un prédateur rode ? Risquer sa vie ? Rester terrer dans son trou ? Ni l’un, ni l’autre : il faut prendre des risques mesurés. Ce que savent très bien faire les rats.

Avant de traverser la rue, nous regardons à droite et à gauche, pour voir une automobile arrive ou si elle est a une distance suffisante pour traverser sans risque. Cette décision suppose de réfréner son envie de traverser, évaluer le risque, puis agir.

On croit souvent que cette aptitude à contrôler ses pulsions (et les soumettre à un décision rationnelle) est une caractéristique humaine. Or, beaucoup d’animaux réalisent eux aussi ce genre de petits calculs de risques avant de s’engager dans l’action.

Deux chercheurs, June-Seek Choi (université de Séoul) et Jeansok Kim, (université de Washington) ont conçu une expérience originale pour observer le phénomène chez le rat. L’expérience simule une situation ordinaire pour les rongeurs. Ceux –ci passent beaucoup de temps dans un terrier qui leur sert de refuge et où ils se sentent en sécurité. Mais il leur faut sortir régulièrement en sortir pour trouver de la nourriture. Ce faisant, ils s’exposent aux prédateurs qui rodent. J.S Choi et J. Kim ont conçu un espace expérimental, comportant un petit nid à rat qui donne sur une pièce rectangulaire. Des rats ont été habitué à sortir de leur petit nid pour venir chercher des croquettes placées au milieu de la pièce.

L’apprentissage effectué, un problème de taille est introduit. A l’autre bout de la pièce, est placé un prédateur. Il s’agit de « Robogator », un robot en forme de petit alligator, qui avance vers la croquette en ouvrant et fermant les mâchoires dès que le rat sort de la cachette. On imagine la surprise et la frayeur du rat quand il voit le robot se mettre tout à coup en marche dès qu’il sort de sa tanière. Et de fait, dès que le robot-prédateur se met en marche, le rat file se terrer, sans demander son reste.

Capture 1

Capture 2

Le rat, consommateur rationnel

Mais si le rat a été affamé pendant plusieurs jours, les croquettes deviennent irrésistibles. Il va donc falloir affronter le danger. Et pour cela faire une estimation du risque. On le voit le rat se risquer à une sortie, puis rentrer aussitôt dès qu’il comprend que Robogator arrivera avant lui. Un peu plus tard, le rat tenter une nouvelle sortie, en longeant les parois. Bref, l’animal surmonte sa peur, mais il ne le fait pas de façon aveugle : il évalue, expérimente, jauge le danger. Bref, il se comportement en consommateur rationnel qui doute, évalue, soupèse les risques et les avantages avant de se lancer dans l’inconnu.

[J. Kim a cherché voulu vérifier quelle région du cerveau était impliquée dans cette décision. L’amygdale (un noyau du système limbique du cerveau, a ne pas confondre avec les amygdales de la gorge) est connue pour être impliquée dans les réactions de peur. Chez les rats dont l’amygdale a été amputé (ou chimiquement inhibé), le rat affamé, n’a plus peur du danger : il sort prendre sa croquette et ignore la présence du robot qui est pourtant en train de se précipiter sur lui. Au contraire, si on stimule chimiquement l’activité de l’amygdale, le rat manifeste le comportement typique du névrosé anxieux : même si la croquette est mise à proximité de lui et loin de Robogator, dans sans grand risque, il reste terré au fond de son refuge. ]

Réf. Choi, J-S., & Kim, J. J. (2010). Amygdala regulates risk of predation in rats foraging in a dynamic fear environment. Proceedings of the National Academy of Sciences, 29 nov. 2010.

Voir les vidéos sur : http://faculty.washington.edu/jeansokk/Robogator.html


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