Un livre à ne pas manquer

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Le 26 décembre 2015 par Jean-François Dortier

Chaque année, durant les fêtes, je consacre un petit moment à faire un bilan de mes meilleures lectures de l’année. Ce petit exercice est un devoir de mémoire qui a pour but de ne pas se laisser emporter toujours par le flot interrompu des nouvelles lectures. Les idées se chassent et bousculent les unes les autres; elles effacent irrémédiablement le souvenir de ce qui mérite de laisser des traces. Or, il est des livres, des idées qui méritent d’être gravés en mémoire. Ne les oublions pas.

Mon palmarès personnel de cette année n’est pas encore établi, mais nul doute que figurera dans le top five : Une certaine vision du monde de Alessandro Barricco. A vrai dire ce livre constitue déjà un palmarès à lui tout seul puisque l’écrivain italien y présente les 50 meilleurs livres qu’il a lu ces dix dernières années. Ayant déménagé en 2002, l’auteur – on ne sait pourquoi – a abandonné sa bibliothèque dans son ancien domicile. Arrivé dans son nouvel apparemment, il a du en reconstituer une nouvelle au fil de ses lectures. De ces dix ans de lectures, il nous livre dont les cinquante meilleurs (à son goût). Les ouvrages sélectionnés viennent de toutes les époques  – on y trouve un Faulkner et le Discours de la méthode: c’est donc un palmarès arbitraire, mais qu’importe: la formule « cinquante livres que j’ai lu et aimés » entre  2002 et 2012, fait mouche.

Pourquoi ? L’auteur s’en explique  par une réponse que je trouve admirable. Aujourd’hui, on se dispute et on discute des films ou de politique, rarement des livres. Et pourtant: «  les livres sont toujours là, par milliers, et ils continuent à incarner une civilisation de plaisirs patients, qui contribuent d’une façon plutôt silencieuse à tracer les contours de l’intelligence et de l’imagination collectives. Tout ce qu’on peut faire pour mettre en valeur une si douce liturgie, on doit le faire. Je vais dont apporter ma pierre à l’édifice ».

C’est magnifique, non ? Mais ce n’est pas tout:

« Il y a une seconde raison, peut-être plus importante encore à mes yeux. J’ai essayé de la résumer dans le titre de ce projet qui a duré un an. Une certaine vision du monde. Le fait est que j’ai de plus en plus der mal à dire ce que je vois quand je regarde autour de moi, et même de fixer un segment particulier de ce grand spectacle ne semble guère fonctionner : on finit par s’empêtrer dans des considérations techniques qui isolent peut-être un détail, mais qui ne permettent pas d’embrasser le tableau d’ensemble (…) Un jour cette idée m’est venue : si je me mettais à prendre les livres que j’ai lu, seulement les bons sans m’interrompre pendant un moment, eh bien, ça exprimerait une certaine vision du monde. Et il y avait de bonnes chances pour que ce soit la mienne ».

Oui, parmi les livres qui méritent d’être retenus, il y a ceux qui nous éclairent sur le monde ou nous même. Ces livres qui nous changent et nous façonnent et contribuent à forger « une certaine vision du monde »

Le premier des cinquante livres est… Open d’André Agassi : oui le champion de tennis ! (La biographie du tennisman est vraiment shakespearienne; elle m’avait aussi remuée, j’en parle dans la fin d’un champion mais je n’aurais pas oser le mettre dans un best of). Le dernier livre de la liste, est l’Autobiographie de Charles Darwin. Entre les deux on trouve des lectures très éclectiques:  romans, essais, livres d’histoire, de la La guerre du Péloponnèse de Donald Kagan à Une histoire du monde sans sortir de chez moi de Bill Bryson, en passant pas Disgrâce de J.M. Coetzee ou Les bailles et les araignée de Marc Fumaroli (un livre qui n’a rien à voir avec les insecte, mais reconstitue la grande querelle des Anciens et des Modernes au 18ème siècle).

A partir de ses lectures, A Barrico a écrit un livre rare : non seulement il est magnifique écrit mais l’intelligence y éclabousse à chaque page. Voilà un livre que j’ai en a envie de faire connaitre et que j’aurais, à coup sûr, envie de relire. De plus, comme il en présente cinquante autres, il me dispense du coup de faire mon propre palmarès.


2 commentaires »

  1. Éric Riendeau-Fontaine dit :

    Merci pr cette suggestion.
    Je suis à même de compléter son livre sur les Barbares.
    En termes de bilan, même s’il n’a pas été écrit en ce sens, j’ai beaucoup apprécié les suggestions que Yann Martel a fait ds « 101 lettres à un premier ministre, Mais que lit Stephen Harper ? »
    Cf. http://www.editionsxyz.com/catalogue/598.html
    Au plaisir de vs relire,

  2. Jane dit :

    Mon voeu pour l’année nouvelle 2016 ? Citer les lectures qui ont été pour moi significatives ?
    Je ne crois pas que je procèderais en limitant ma liste (des meilleures lectures faites jusqu’ici) à un nombre de titres ni à une période de ma vie, d’autant que je continue à lire, et même parfois de façon accélérée, sans doute parce que l’époque terrible que nous traversons pousse à confronter nos réflexions. Votre proposition contribue à ces échanges vitaux de la pensée.
    Je ferais plutôt un parcours non fléché dans le labyrinthe de ma mémoire, dans les rayonnages de ma bibliothèque, ma collection d’articles de presse et de hors série, avec des retours et reprises, des ajouts et rectifications, des reclassements thématiques semblables ou différents, sans fin, parce que l’éclectisme de mes choix dépendraient plus souvent des conjonctures ou des interrogations et prises de position de mon entourage à l’instant « t » que de spéculations fumeuses ou étrangères à l’esprit du temps. Par exemple, je citerais parfois des anciens qui ont été visionnaires ou des auteurs peu/mal connus qui ont été rejetés à cause de leur regard critique trop dérangeant pour l’ordre établi (tradition, académisme, idéologie meurtrière), pour les pensées uniques successives qui marquent les obscurités ou écueils des cultures du monde.
    Donc vous ne pouvez pas obtenir de moi une liste figée forcément discutable si elle n’est pas, d’une manière ou d’une autre, reliée au vécu, au réel, aux préoccupations du moment. Les lecteurs d’aujourd’hui veulent-ils s’évader ou comprendre ?
    Tout juste pouvez-vous pressentir qu’actuellement, il conviendrait de lire et faire lire des essais historiques, sociologiques, des fictions et bandes dessinées qui offrent une relecture du passé(une critique constructive), en vue d’éclairer le présent, afin de voir la (les) direction(s) à prendre ensemble pour demain.
    Alors, bon courage aux responsables de la formation actuelle des générations de maîtres et de la jeunesse qui constitue leur interlocuteur.

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