Comment vaincre ses peurs : manuel de combat
9Le 23 janvier 2012 par Jean-François Dortier
Peur de l’échec, peur des conflits, peur des autres, peur du chômage, peur de… La peur paralyse l’action. Il existe cependant des moyens pour la dépasser.
La vie de Bernard est dominée par ses peurs. Bernard, qui est cadre commercial, a peur d’affronter son directeur ; il a peur aussi de ses collaborateurs ; il a peur de se retrouver un jour au chômage. Au collège déjà, il avait peur d’aborder les filles. Ses peurs lui pourrissent la vie : elles lui font honte et entravent la réalisation de ses projets.
Bernard est l’antihéros du livre Le Syndrome du lapin dans la lumière des phares, un manuel rédigé par deux consultants. Tout au long de l’ouvrage, on suit Bernard qui se démène pour trouver ses solutions. D’abord, il va chercher dans sa bibliothèque ce que disaient les penseurs de la peur. Dans un livre de psychologie, il découvre que la peur est universellement partagée car c’est un mécanisme adaptatif. Mais cela ne l’aide pas beaucoup. Dans ses livres de philosophie datant du lycée, il découvre que la peur se distingue du danger réel, et qu’il faut savoir l’observer pour la comprendre et la dompter. C’est déjà un premier pas.
Il découvre ensuite que certaines peurs cachent d’autres émotions : la honte de l’échec et la crainte de l’humiliation. S’il a peur d’aborder une femme qu’il désire, c’est qu’il craint de « perdre la face » en cas de refus. Voilà ce qui le paralyse. Au judo, on apprend à tomber. Peut-être que s’il avait moins peur de la chute, il hésiterait moins à s’exposer ?
Au terme du livre, Bernard est parvenu à se libérer de ses craintes les plus tenaces. Il essaie de sortir de son terrier le lapin terrorisé qui était en lui. Il est allé affronter son patron et a réussi à recadrer son collaborateur. Bref, il va déjà mieux.
Nous connaissons tous la peur. Peur des chiens pour les uns, peur de décrocher le téléphone pour les autres. Ou encore, peur de la maladie, peur du chômage, peur de parler en public, peur de décevoir, peur de déranger, peur de trop s’exposer… Et ces peurs sont invalidantes. Elles nous freinent. Affronter sa peur, c’est souvent la première condition pour changer.
Affronter sa peur, ce n’est pas la supprimer : ce qui n’est ni possible ni sans doute souhaitable. Il faut néanmoins la dompter et ne plus se laisser envahir par elle. Et cela s’apprend.
Partons d’un exemple. Le voisin ou la voisine du dessus est un sans-gène, qui écoute de la musique très fort, n’hésite pas à passer l’aspirateur à toute heure et porte des talons qui raisonnent sur le sol. Mais pour Julien (ce pourrait être aussi Jérémy, Justine, Juliette, etc.), une personne très timide, aller au-devant du voisin, l’aborder pour lui parler est un gros problème. Il a peur. Et à la peur s’ajoute la honte : celle-là même de ne pas oser aller lui parler. La solution ? Elle peut se résumer en trois étapes :
1. Prendre conscience
Tout processus de changement passe par la prise de conscience de ses propres schémas mentaux. Si celui qui a peur de tout (du voisin, de son patron, de ses collègues, des coups de téléphone) examine ses comportements, il verra aisément que c’est bien la peur qui dicte son comportement puisque les personnes sont différentes et la peur toujours là. La plupart des chiens, des voisins, des coups de téléphone sont inoffensifs. Le problème de Julien n’est donc pas le voisin, mais sa peur.
Essayons d’analyser à quoi ressemble la peur et l’angoisse sous-jacente qui l’alimente. Julien est en fait paralysé à l’idée que son voisin réagisse de façon hostile, qu’il le rembarre (et, dans ses pires cauchemars, l’insulte, le bouscule, le gifle). À la crainte de l’agression physique se mêle aussi la peur de l’humiliation et de l’incapacité à réagir. C’est cette situation extrême qui terrorise Julien.
L’autoanalyse de ces pensées, émotions, fantasmes et réactions associées est le premier pas pour dominer sa peur. Un premier pas essentiel car il va permettre d’imaginer et de scénariser d’autres solutions, d’autres schémas de conduite, d’autres réactions que celle qu’il rumine en boucle et le paralyse.
2. Trouver des alternatives
La deuxième étape du changement consiste à formuler des réponses mieux adaptées à la situation. En fait, Julien a le sentiment qu’il n’existe qu’une alternative : soit exprimer ses reproches (avec un risque de riposte et d’emballement), soit fuir (et ne rien dire).
Il lui faut donc élaborer mentalement toute une gamme de situations et s’y préparer. Julien doit donc imaginer des scénarios, préparer son entrée en matière, se présenter, exposer le problème en évitant le conflit, prévoir des alternatives, construire des stratégies, trouver des parades, éviter les pièges, s’armer et se défendre de tout risque de dérapage…
Au fond, Julien a peur de la rencontre car il ne sait pas trop comment s’y prendre. Il est donc enfermé dans un schéma archaïque et répétitif : fuite ou conflit. Or, d’autres voies sont possibles.
Julien a consulté un manuel de négociation. Il y apprend que la posture de départ est primordiale. Lorsqu’on formule une réclamation, il faut éviter de remettre en cause l’interlocuteur et en rester au niveau des faits. Le problème ici, c’est le bruit, pas le voisin. « Vous faites trop de bruit avec votre musique », « Vous ne pourriez pas faire moins de bruit, c’est insupportable ! » sont des attaques frontales qui mettent en cause une personne. Il est moins conflictuel de commencer par un salut aimable et courtois : « Bonjour. Vous allez bien ? Je voulais vous voir à propos d’un problème. Vous écoutez souvent de la musique, c’est bien ! Mais le son de la chaîne est très fort et on l’entend beaucoup de chez moi. » Dans cette formule, il n’y a pas d’agression. Julien pourrait donc commencer par là. À ce moment-là, il faut se taire. Ne pas en dire plus et attendre une réponse (quitte à laisser couler quelques longues secondes de silence). Imaginons la suite :
• Première réaction : le voisin répond aussitôt « C’est vrai ? Je suis désolé, je ne me suis pas rendu compte. » Contre toute attente sa réaction est très positive. Non seulement, il n’a pas sauté à la gorge de Julien, mais il s’est excusé. C’est une victoire immédiate et sans combat. Elle surprend tellement que Julien en est presque gêné. Au point d’ailleurs de reculer aussitôt : « Bon, ce n’est pas très grave, je sais ce que c’est. Ça peut m’arriver à moi aussi » Non Julien, surtout pas ! Au lieu de remercier le voisin pour sa compréhension, Julien s’excuse de déranger et vient de dire implicitement au voisin qu’il peut continuer puisque « ce n’est pas très grave ». Il faut savoir garder son avantage lorsque l’on a fait un pas en avant et ne pas reculer aussitôt.
• Deuxième réaction : après avoir entendu la réclamation « le son est très fort », le voisin se contente de regarder Julien d’un air suspicieux et réplique « Oui, et alors ? » Il vient de renvoyer la balle fermement. Que faire ? Une possibilité est de répliquer par une demande plus explicite mais toujours courtoise : « Vous ne pourriez pas avoir la gentillesse de mettre la musique moins fort, s’il vous plaît ? »
À ce stade, Julien a déjà marqué plusieurs points : 1) il a formulé sa demande ; 2) il est resté courtois et n’a pas donné prise au conflit ; 3) il n’est pas mis en danger.
De fait, c’est le voisin qui se trouve dans l’embarras. Compte tenu de sa situation de mise en accusation, il va sans doute chercher à se justifier, minimiser ou contre-attaquer mollement. « Vous exagérez ! Je n’ai pas mis le son si fort que cela ! » ou bien « Ce n’est quand même pas si souvent que ça arrive », ou encore « Et vous, vous ne vous rendez pas compte du bruit que vous faites avec votre télévision. » À cette étape, le risque est de chercher à répondre systématiquement à tous ces contre-arguments. Le voisin a été mis en accusation et cherche une porte de sortie. Dans toute confrontation, il est important que chacun puisse « garder la face ». Il ne faut pas prendre toutes les ripostes verbales pour un déni du problème et un refus de changer. Ce sont des issues de secours destinées à garder la tête haute durant l’échange. Il y a toute chance pour que le message ait tout de même été entendu. Face aux dénégations, inutile de pousser le voisin dans ses retranchements. Julien peut se contenter de reformuler sa demande « Je vous assure, le son était très fort »… et remercier le voisin d’avoir pris en compte se demande (même s’il ne l’a pas fait explicitement).
• Troisième réaction : le voisin est un irascible, un dur à cuire. Et il renvoie Julien dans ses cordes. C’est le scénario du pire, que Julien redoute le plus. Que faire si le voisin réplique : « Écoutez, vous n’allez pas m’emmerder avec ça. Je suis chez moi, je fais ce que je veux » ? D’abord, il faut admettre que la réaction est possible, mais rare (comme les chiens qui mordent). Mais Julien doit tout de même se préparer mentalement à cette possibilité. Même peu probable, c’est justement le scénario qui le hante et le terrorise. Il lui faut donc trouver une parade et une issue. La meilleure façon est de désamorcer le conflit en coupant court à la conversation : « Bon écoutez, je vous ai fait part de ma demande. Je vous remercie d’en tenir compte. » Avec cette formule, Julien s’en sort sans fuite, ni menace (dont il est d’ailleurs incapable), ni prostration. Il garde son sang-froid et surtout il évite de s’enfermer dans une dispute interminable qui ne mènerait à rien. Après un salut, Julien pourrait tourner les talons. « Écoutez, je vous ai dit ce que j’avais à vous dire. Au revoir. »
Julien tient sa sortie de secours : il dispose d’une formule « coupe-circuit », préparée à l’avance, et qui met fin à la confrontation.
Même dans ce scénario du pire, Julien a gagné une manche. Car, même dans l’hypothèse où le voisin l’a « envoyé balader », il y a de fortes chances pour que le son de sa musique baisse le soir même… Les gens sont ainsi faits : ils n’aiment pas être ouvertement mis en cause, font souvent preuve de mauvaise foi pour défendre leurs positions, mais une fois les talons tournés, ils réfléchissent…
Et si le son de la musique ne baisse pas pour autant, Julien a tout de même remporté une première victoire : il aura dominé sa peur et réussi à affronter ses craintes. Nul n’est certain de remporter une bataille, mais l’important est déjà d’oser mener le combat.
Le problème n’a pas été résolu, mais Julien a fait un grand pas : il a surmonté son fantasme-écran, dominé sa peur, est passé à l’action. C’est un pas énorme. Ce serait une victoire sur son principal adversaire : lui-même.
3. Se lancer. De l’audace !
Voilà : Julien se sent maintenant armé mentalement pour affronter la situation. Il a imaginé les situations possibles, répété les phrases clés et donc sécurisé ses positions. Il a même envisagé le scénario du pire et sait comment réagir. Il s’est défait de ses hantises et de ses schémas mentaux fantasmatiques. Il est prêt. Le temps est donc venu de passer à l’acte. Et c’est aujourd’hui. Mais au moment venu, les forces l’abandonnent. À l’heure de franchir le pas, il sent tout à coup sa volonté faiblir.
Heureusement, Julien s’est préparé à ce moment de défaillance. Il savait par avance que le moment venu, il allait être tout à coup envahi par une poussée de stress qui allait lui couper les jambes et ruiner en un instant toute sa préparation mentale. Il ouvre alors son placard, sort la bouteille de whisky achetée pour l’occasion. Il s’assoit sur son canapé, se sert une bonne rasade et attend une minute ou deux. À ce moment-là, le bruit de la musique traverse la cloison. Il se relève, respire à fond. Et une petite voix intérieure lui glisse à l’oreille : « Il est temps Julien. Tu ne risques rien. Vas-y, c’est maintenant : ta nouvelle vie va commencer. »
Catégorie Art de vivre & anti-sagesse
Pour un thérapeute comportementaliste bien formé (au minimum reconnu officiellement par une association nationale de TCC) se verser une bonne rasade de whisky avant la confrontation est une aberration. Cela risque de devenir un rituel avec les conséquences à long terme que l’on sait. Il s’agit bien plutôt de gérer l’activation émotionnelle en ayant appris préalablement comment se décontracter rapidement, comment réguler la respiration et éviter l’hyperventilation, comment se donner des instructions tr§ès précises. Le cas ici décrit est une phobie sociale. Il y a bien d’autres types de phobies, en particulier celles qui trouvent leur source dans la peur des sensations corporelles liées à l’anxiété et qui produisent un effet de spirale menant à des a(voir H. Orlemans & O. Van den Bergh, Phobies intéroceptives et phobies de maladies. PUF, Coll. Nodules, 1997, 128 p). A mon avis, le meilleur ouvrage en français sur les phobies est encore toujours celui de Christophe André : Psychologie de la peur. Craintes, angoisses et phobies. Odile Jacob, 2004, 366 p).
Pour un thérapeute comportementaliste bien formé (au minimum reconnu officiellement par une association nationale de TCC) se verser une bonne rasade de whisky avant la confrontation est une aberration.
Il s’agit bien plutôt de gérer l’activation émotionnelle en ayant appris préalablement comment on se décontracte rapidement, comment on éviter l’hyperventilation, comment on se donne des instructions. Le cas ici décrit est une phobie sociale.
Il y a bien d’autres types de phobies, en particulier celles qui trouvent leur source dans la peur des sensations corporelles liées à l’anxiété et produisent un effet de spirale menant à des attaques de panique et des nosophobies (voir H. Orlemans & O. Van den Bergh, Phobies intéroceptives et phobies de maladies. PUF, Coll. Nodules, 1997, 128 p).
A mon avis, le meilleur ouvrage en français sur les phobies est encore toujours celui de Christophe André : Psychologie de la peur. Craintes, angoisses et phobies. Odile Jacob, 2004, 366 p).
• Troisième réaction : le voisin est un irascible, un dur à cuire. Que faire si le voisin réplique : « Écoutez, vous n’allez pas m’emmerder avec ça. Je suis chez moi, je fais ce que je veux » ? D’abord, il faut admettre que la réaction est possible, mais rare (comme les chiens qui mordent). Même peu probable, c’est justement le scénario qui le hante et le terrorise. Il lui faut donc trouver une parade et une issue. La meilleure façon est de désamorcer le conflit en coupant court à la conversation : « Bon écoutez, je vous ai fait part de ma demande. Je vous remercie d’en tenir compte. » Avec cette formule, Julien s’en sort sans fuite, ni menace (dont il est d’ailleurs incapable), ni prostration. Il garde son sang-froid et surtout il évite de s’enfermer dans une dispute interminable qui ne mènerait à rien. Après un salut, Julien pourrait tourner les talons. « Écoutez, je vous ai dit ce que j’avais à vous dire. Au revoir. »
Bonjour,
Je souhaite attirer votre attention sur le fait que le voisin tel que vous le décrivez, est une espèce très répandue. Les messieurs (ou dames) « j’vais gêner » ou « je suis seul(e) au monde » sont pléiade. Pardonnez moi de vous le dire…
Danièle
Il y a quand même une origine toute bête à la peur: celle de ne pas être aimé. Alors tout vaut mieux qu’un affrontement dont l’enjeu est justement de ne plus être aimé de son voisin, de son collégue de travail, de son conjoint. Et cette peur là n’est pas « raisonnable ». Elle ne peut se dissoudre dans la réflexion ou le comportement adapté. Elle force au compromis permanent, à une frustration et à terme à une perte de soi. La vrai question est de savoir comment on peut « oser » dire merde – sans whisky préalable – et sans craindre de s’effondrer. A suivre…
PS. Votre édito de SH ( avril) et surtout votre article sur l’abandon par Freud de l’inconscient sont formidables. Bravo
Je trouve que la méthode proposé par cette personne est bonne. En effet quand on a une peur, on entend les personnes nous dire: mais vazi allez reflechis pas. cela peut etre une bonne solution agir sur un coup de sang mais cette méthode est bien mieux adapté je trouve car elle permet à la personne de dominer sa peur petit à petit et de ne pas etre maladroite dans la situation. Je prend comme exemple la personne qui n’a jamais l’habitude de s’énerver et qui d’un coup va se décider à s’imposer et va littéralement exploser, ce qui va susciter l’incomprehension des autres et va lui faire perdre toute crédibilité.
C’est bien de se lancer et de combattre certaines peurs qui nous empoisonnent la vie, comme par exemple, faire un enfant, se marier, garder son CDI malgréles difficultés rencontrées au travail, acheter une maison, rembourser un crédit… Si on n’essaye jamais, on ne saura pas si ça va marcher. Il y a des gens toujours négatifs pour nous décourager dans nos choix de vie, mais si nous suivons notre voie, ces mêmes gens-là viennent nous récompenser et nous féliciter quand ils s’apperçoivent que tout marche très bien dans notre vie, parce qu’on a écouté notre voix intérieure et qu’on ne s’est pas laissé écraser, décourager ni faire parles gens et par les évènements de notre vie. Qu’on a décidé de prendre notre avenir au sérieux, entre nos mains et d’affronter tous les obstacles qui se présenteront devant nous à vie… COUAGE est le maître mot ; COURAGES POUR TOUTES LES SITUATIONS ET LES GENS QUI NOUS METTENT DES BÂTONS DANS LES ROUES SE PRESSENT DE COPIER TOUTES NOS INITIATIVES, QUAND ILS VOIENT QUE NOTRE VIE REUSSIE ET QUE TOUT CE QU’ON TOUCHE MARCHE A MERVEILLE.
jaime votre site tres chic
oui
et si on se sent mal en soi inconfiant peureu et angoisser ss cessse qui a le remede a ca